L’attaque du camp militaire d’Indelimane qui a tué quarante-neuf soldats maliens suscite l’incompréhension des Maliens qui critiquent le manque de réactivité de l’armée et de l’Etat.
L’émotion reste vive après l’attaque vendredi dernier (1er novembre) d’un camp de l’armée malienne à Indelimane (dans le nord du pays). 49 soldats ont péri dans cette sanglante attaque revendiquée par l’organisation Etat islamique, précisément de sa “province Afrique de l’Ouest”.
À la colère et l’incompréhension, s’ajoute désormais une certaine impatience chez une grande partie de la population face à la réaction des autorités. Beaucoup estiment en effet que l’exécutif ne fait pas assez pour prévenir et faire face aux assauts des groupes terroristes contre l’armée.
Pour Mohamed Salaha, un jeune ressortissant du nord du Mali, il faut un redéploiement des hauts gradés de l’armée malienne sur les théâtres des opérations.
“Il faut vraiment que ce cinéma arrête ou on voit à Bamako les généraux, les hauts gradés de l’armée se pavaner entre les postes administratifs. Les militaires sont faits pour le terrain, les militaires sont faits pour la guerre. Il est inadmissible d’envoyer des jeunes sans expériences de combat à la boucherie. Ces généraux, nous avons besoin d’eux sur le terrain pour sécuriser nos populations”, soutient-il.
Sagara Bintou Maiga, la présidente du collectif des femmes et parents des bérets rouges disparus lors des évènements de 2012 au Mali a perdu un voisin de quartier, qu’elle considérait comme son fils, lors de l’attaque contre le camp des forces armées maliennes à Indelimane.
“Tantôt c’est 40 morts, 50 morts, 60 morts… L’attaque jihadiste à Boulkessi dans le centre du pays a été un choc pour tout le monde ici. Que dire de ce qui vient de se passer à Indelimane ou je viens d’assister aux obsèques d’un fils tombé au cours des combats. Je demande aux femmes de sortir massivement et de se vêtir de tenue rouge et de foulard rouge pour une marche pacifique de protestation 3 jours d’affilée. Je peux vous assurer qu’il se passera quelque chose”, promet-elle.
De son côté, Moulaye Dansoko, enseignant, estime que les forces armées maliennes doivent passer à l’offensive pour ne plus subir les attaques des groupes jihadistes.
’Nous ne partons pas les chercher pour les chercher afin de mettre fin à leur projet qui est d’autre siècle. Notre armée attend toujours qu’elle soit attaquée d’abord pour se défendre. Nous devons donc changer de stratégie en allant traquer ces gens jusque dans leur dernier retranchement. Le terrorisme est un phénomène certes mondial, mais chacun à ses problèmes. Nous devons donc compter sur nous-même d’abord pour pouvoir venir à bout de ce mal’’, explique le chercheur.
“Union sacrée”
Après les attaques les plus meurtrières subies depuis des années par l’armée des mains des jihadistes, le président Ibrahim Boubacar Keïta a appelé lundi (4 novembre) les Maliens à “l’union sacrée” derrière leur armée. Car, estime-t-il, l’existence même du pays est en jeu.
Plutôt dans la matinée, IBK avait décrété trois jours de deuil national. Il a aussi mis en garde contre la tentation de tomber dans “le piège” de l’ennemi, “qui est de nous opposer les uns aux autres et de saper le moral de nos vaillants combattants”.
“Dans ces circonstances particulièrement graves où la stabilité et l’existence de notre pays sont en jeu, notre seule réponse doit être l’union nationale, l’union sacrée autour de notre armée nationale”, a-t-il déclaré le président malien à ses compatriotes.
“Nouveau concept opérationnel
Face aux attaques, le président malien a dit avoir ordonné récemment pour l’armée l’élaboration d’un “nouveau concept opérationnel qui donne une part importante à l’offensive”.
Le soutien des forces étrangères, française, africaine et onusienne déployées au Mali “nous est plus que jamais nécessaire et c’est pourquoi je demande à ce que nous ne nous trompions pas d’ennemis”, a déclaré Ibrahim Boubacar Keita qui se fait l’écho des critiques qui s’élèvent contre la présence de troupes étrangères au Mali.
“Patience”
La ministre française des Armées, Florence Parly, en tournée dans le Sahel, a prôné la patience dans la guerre contre les djihadistes. Elle a également annoncé le lancement d’une opération de l’opération militaire Barkhane dans la zone des trois frontières Burkina-Mali-Niger.
“Nous mettrons du temps à vaincre ces groupes qui prospèrent sur les difficultés sociales et économiques des pays sahéliens”, a déclaré Florence Parly au Centre opérationnel interarmées de la force française Barkhane, à N’Djamena, lors de la première étape de sa tournée dans le Sahel.
Après le Tchad, la ministre française des Armées s’est rendue à Ougadougou. Elle a été reçue par le président Roch Marc Christian Kaboré avant de rendre visite aux quelque 200 membres des Forces spéciales françaises.
Le Mali sera la dernière étape de la tournée régionale de la ministre Florence Parly