Sénégal: éviter la fuite de l’or artisanal au Mali

Sénégal: éviter la fuite de l’or artisanal au Mali

Selon les estimations, 90% de l’or artisanal exploité au Sénégal partirait vers le Mali via des circuits informels. Un manque à gagner pour Dakar qui cherche à réguler la filière.

C’est un chantier que tous les États sahéliens cherchent à mettre en place et le Sénégal ne fait pas exception. Car le constat est dur à entendre : seulement 10% environ de l’or produit de manière artisanale dans le pays transiterait par les comptoirs agréés par l’État. Et seulement 10% peuvent donc être taxés à l’exportation. Le reste part entre les mains d’intermédiaires maliens et, dans une moindre mesure, guinéens. Une fuite facilitée par la proximité géographique des zones aurifères sénégalaise avec la frontière malienne. Mais aussi par des circuits bien huilés et des prix alléchants.

Les collecteurs maliens achètent souvent à 80 ou 90% du cours mondial, même si l’or n’est pas pur, explique Cherif Sow, consultant international en exploitation minière artisanale et à petite échelle d’or (Emape). Les intermédiaires maliens ont par ailleurs la capacité financière d’acheter de grosses quantités. « Ils récupèrent ensuite une marge suffisante, via des petits arrangements localement ensuite au Mali », explique notre interlocuteur.

Une taxe à l’export trop élevée ?

Le Sénégal produit environ 13 tonnes d’or par an, via le circuit industriel, mais voit s’évaporer l’essentiel des quatre tonnes d’or issues de ses mines artisanales. D’où la volonté aujourd’hui des autorités de réguler et formaliser le secteur.

Un rapport remis la semaine dernière au ministère sénégalais préconise comme solution la suppression de la taxe d’exportation instaurée en 2018. D’un montant de 4%, c’est une des plus élevées dans la sous-région. Elle n’a visiblement pas rapporté les recettes fiscales escomptées, mais plutôt « accentué la fuite de l’or », selon Cherif Sow, qui est l’auteur principal du rapport. « Sa suppression est une doléance des acheteurs d’or de la ville de Kédougou qui la vivent comme un handicap », ajoute-t-il.

En attendant une réglementation ouest-africaine

Le Togo a testé une formule radicale : il n’impose pas de taxe à l’exportation de l’or. Une des mesures qui explique certainement que le pays soit devenu un des principaux exportateurs d’or de la région alors qu’il n’en produit pas.

Face aux disparités et aux défis que pose l’orpaillage dans la zone ouest-africaine, la Cédéao planche elle aussi depuis des mois sur une réglementation du secteur.