Le Conseil de sécurité de l’ONU a ordonné jeudi au secrétaire général de l’Organisation, Antonio Guterres, de déployer une avant-garde d’observateurs du cessez-le-feu en Libye, selon une lettre obtenue par l’AFP.
“Alors qu’ils étudient votre recommandation d’amender le mandat de la Mission de soutien des Nations unies en Libye (Manul), les membres du Conseil de sécurité vous demandent d’établir et de déployer rapidement une avant-garde en Libye”, indique cette missive qui a fait l’objet de négociations pendant plus d’une semaine.
Le Conseil précise dans sa lettre attendre sous 45 jours au maximum un rapport sur les préparatifs menés par cette équipe d’observateurs, ainsi que ses propositions pratiques, pour amender le mandat de la Manul et mener à bien une opération d’observation amenée à prendre de l’ampleur progressivement et à s’étendre géographiquement.
Dans un rapport fin 2020, Antonio Guterres, sans définir le nombre de ses effectifs, avait préconisé la constitution d’un groupe d’observation non armé, formé de civils et de militaires à la retraite venant de pays de l’Union africaine, de l’Union européenne et de la Ligue arabe.
Le déploiement d’observateurs se fait en accord avec les parties libyennes.
Dans son rapport, le chef de l’ONU évoque “les fondations d’un mécanisme évolutif de surveillance du cessez-le-feu des Nations unies basé à Syrte”, qui était la ville natale de l’ex-dictateur Mouammar Kadhafi. Par la suite, l’opération d’observation serait amenée à s’étendre dans le pays.
L’avant-garde des observateurs devrait comprendre jusqu’à une trentaine de personnes, ont indiqué à l’AFP des diplomates.
En application de l’accord conclu le 23 octobre entre les belligérants, les observateurs internationaux auront à superviser le cessez-le-feu observé depuis l’automne et vérifier le départ des mercenaires et militaires étrangers déployés en Libye.
- Mercenaires –
D’après l’ONU, le pays comptait toujours début décembre 20.000 mercenaires et soldats étrangers et aucun signe de retrait n’a été constaté depuis.
Homme fort de l’Est de la Libye, le maréchal Khalifa Haftar a bénéficié du soutien des Emirats Arabes Unis et de mercenaires venant de Russie tandis que les troupes du Gouvernement d’union nationale (GNA) basé à Tripoli ont obtenu entre autres l’appui de l’armée turque et de rebelles syriens.
Les négociations du Conseil de sécurité sur la lettre envoyée à Antonio Guterres ont pris du temps notamment, selon des diplomates, parce que la Russie a demandé plusieurs amendements, dont celui d’avoir un déploiement de l’avant-garde “en Libye” et non “à Tripoli” comme le prévoyait un texte initial.
Derrière ces demandes, précise un diplomate sous couvert d’anonymat, figure le souci d’avoir un départ de Libye simultané des troupes turques et des mercenaires russes et non seulement de ces derniers.
Fin janvier, les Etats-Unis du nouveau président Joe Biden, soutenus par une déclaration unanime du Conseil de sécurité, avaient réclamé “à la Turquie et à la Russie de commencer immédiatement le retrait de leurs forces” de Libye.
Parallèlement aux discussions militaires menées par les belligérants pour garantir la poursuite du cessez-le-feu, ces derniers poursuivent à Genève des discussions politiques pour établir une nouvelle direction unifiée du pays avec en ligne de mire la tenue d’élections nationales le 24 décembre.
La Libye a été plongée dans le chaos après la chute du régime de Mouammar Kadhafi due à une révolte populaire en 2011 soutenue par une coalition internationale menée par les Occidentaux. Le pays est soumis à un embargo sur les armes qui a été régulièrement violé au profit des deux parties.
Après l’échec d’une offensive lancée par le maréchal Haftar en avril 2019 pour conquérir Tripoli, au terme de plus d’un an de combats aux portes de la capitale, les deux camps ont conclu une trêve fin 2020. La production pétrolière, secteur névralgique de l’économie, a entre-temps connu un rebond significatif.