Le groupe djihadiste, qui a tué plus de 900 personnes depuis le début de son offensive, en mars, consolide son emprise sur la région tout en déployant ses tentacules au Sahel.
Les survivants affluent depuis mars et Boubou* ne se fait plus d’illusion : dans les prochaines semaines, les rescapés des massacres perpétrés par l’organisation Etat islamique au Grand Sahara (EIGS) vont continuer d’arriver massivement à Gao. « Il y a principalement des femmes et des enfants, dans un piteux état. Beaucoup d’hommes de leur famille ont été tués. Ces gens n’ont plus rien », raconte ce défenseur des droits humains installé à Gao. Cette localité du nord-est du Mali apparaît comme le dernier bastion capable de garantir la sécurité des habitants du Liptako Gourma, un vaste territoire à cheval sur les frontières du Mali, du Burkina Faso et du Niger, devenu l’épicentre des violences djihadistes au Sahel.
Les déplacés y sont installés dans trois camps de fortune et chez des familles d’accueil. Les derniers arrivés ont fui Talataye le 6 septembre. Ce jour-là, cette commune située à 150 km à l’est de Gao s’est transformée en un champ de bataille. D’un côté l’EIGS, de l’autre le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, affilié à Al-Qaïda), appuyé par le Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA), un groupe armé fidèle à l’Etat et partie prenante de l’accord de paix d’Alger signé en 2015 entre Bamako et les ex-groupes rebelles.
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Fait marquant dix ans après le début de la guerre déclenchée dans le nord du Mali en 2012 par une coalition de mouvements indépendantistes et djihadistes, un groupe armé loyaliste et un autre affilié à Al-Qaïda ont donc collaboré pour tenter de faire reculer un ennemi commun qui ne cesse de gagner du terrain depuis le début de son offensive, lancée en mars dans la partie malienne du Liptako Gourma.
A Talataye, au moins 30 civils, 17 combattants du GSIM et trois membres du MSA ont été tués, selon l’ONG Armed Conflict Location & Event Data Project (Acled). Depuis mars, ce sont plus de 900 personnes, majoritairement des civils, qui ont été tuées par l’EIGS dans les régions de Gao et de Ménaka,