Fuyant la guerre au Tigré, de plus en plus d’Éthiopiens se réfugient au Soudan voisin. Depuis un peu plus d’une semaine, près de 30 000 réfugiés sont arrivés au Soudan, selon le UNHCR. Ils racontent la violence des combats au Tigré et assurent que l’Érythrée est aussi impliquée dans les combats.
Le jour se lève à Hamdayet. Une foule de réfugiés attend de pouvoir monter dans une quinzaine de bus affrétés par le UNHCR. Solomon et Barakat sont arrivés il y a deux jours. « C’était trop dangereux de rester là-bas. On a vu, de nos propres yeux, des gens se faire égorger comme des moutons », raconte l’un. « La seule échappatoire c’était de venir au Soudan à bord de petit bateau à moteur. Je ne sais pas ce qui nous attend ici. On n’a aucune perspective, pas d’autres solutions », ajoute le second. Les deux amis ne savent pas où on les emmène.
Les femmes, les enfants montent en premier. Les hommes sur le toit sont en plein soleil. Une femme, son bébé sous le bras, une toile de jute avec quelques affaires sur les genoux s’apprête à embarquer. « On n’a plus de maison, on a tout quitté. Je viens de Mai-Kadra. Les gens s’entretuaient à coup de couteau et d’armes à feu. Ici, à Hamdayet, nous sommes en vie, oui, mais il n’y a presque pas d’eau et très peu nourriture, décrit-elle inquiète. Donc on va dans un autre camp, on nous a dit que les conditions seraient meilleures. Je dois avouer que j’ai très peu d’espoir pour la suite. »
1 300 personnes doivent être transférées à 70 kilomètres d’ici dans le camp d’Oum Rakuba. Ce qui les attend ? Un immense terrain vague où l’ombre se fait rare. Les ONG ont commencé à construire des tentes pour accueillir les près de 30 000 Éthiopiens réfugiés au Soudan.
Pour les réfugiés, l’Érythrée est intervenu
De nombreux réfugiés ont été témoins des bombardements à Humera. Ils racontent une attaque brutale et accusent l’Érythrée d’être intervenue aux côtés de l’armée éthiopienne. « J’étais en train de travailler à l’hôpital lorsque soudain j’ai entendu des explosions. C’était des tirs d’artillerie. La ville était attaquée de toutes parts. De nombreux civils ont été blessés, il n’y avait aucun soldat en ville à ce moment-là », décrit le docteur Darielo.
Ils sont nombreux dans le camp à avoir fui le siège de Humera comme le médecin. Pour Solomon, aucun doute, la ville a été prise en tenaille, au sud par l’armée fédérale et au nord par l’Érythrée. « Les tirs venaient des positions érythréennes. Lorsqu’ils ont commencé, on ne comprenait pas, on se disait, mais d’où vient l’ennemi ? Il était dans notre dos. »
Nagassi, fonctionnaire à Humera, affirme avoir vu de ses propres yeux des tirs à l’arme lourde venir du nord. « Notre Premier ministre Abiy Ahmed et le président érythréen Issaias Afwerki, main dans la main, ont détruit notre ville. C’est évident. La ville d’Humera est collée à l’Érythrée. Des troupes y avaient été déployées. »
Deux sources des renseignements militaires soudanais ont confirmé, sous couvert d’anonymat, l’intervention de l’Érythrée dans cette zone frontalière.