L’arrêt est tombé, au cours de la session en cours des Assises, tenue le vendredi 13 novembre dernier. Le chef de la Katiba Khalid ibn al-Walid / Ançar Dine Sud, Souleymane Keita, arrêté depuis 2016, a été condamné à mort. Une peine similaire a été prononcée à l’endroit de quatorze autres membres de cette nébuleuse, dont deux seulement étaient présents au procès.
Comme ce fut le cas fin octobre au procès d’une autre figure du terrorisme au Mali, Fawaz Ould Ahmed, également condamné à mort, des incertitudes subsistaient quant à la présence de Souleymane Keïta à son procès tenu le vendredi 13 novembre dernier. Sauf qu’à la différence de celui qu’on surnomme » Ibrahim 10 « l’audience du chef de la Katiba Khalid Ibn Al-Walid/ Ançar Dine Sud n’a pris qu’une journée. Il a fallu moins de quatre heures pour que son sort et celui de quatorze membres de sa nébuleuse soient connus.
Pourtant, le nom de Souleymane Kéïta avait été cité parmi les détenus libérés, en février 2019, en échange du préfet de Tenenkou et d’un journaliste. Des sources rapportent aussi qu’après cette libération, il a été capturé de nouveau par Barkhane. En tout état de cause, il était bel et bien présent à son procès. La charge qui était retenue contre lui et ses coaccusés était d’avoir fait partie du commando ayant perpétré en 2015 les attaques contre les localités de Misséni et de Fakola, toutes deux relevant de la région de Sikasso, près de la frontière ivoirienne.
Pour la première localité visée, le bilan faisait état d’un gendarme tué et des blessés. Quant à la seconde localité, on déplorait surtout des dégâts matériels à travers l’incendie, la destruction et le pillage de plusieurs bâtiments publics. C’est grâce au démantèlement d’une base logistique des terroristes dans la forêt de Sama, près de la frontière nigérienne, en 2015, que les éléments de Katiba Khalid Ibn Al-Walid/ Ançar Dine Sud se sont dispersés, même si certains se sont mêlés à la masse. C’est finalement en 2016 que Souleymane Kéïta sera capturé par les services de renseignements maliens alors qu’il tentait de rejoindre son mentor Iyad Ag Ghali au nord du pays en passant par la forêt de Wagadou.
Des condamnés déjà libérés ?
Lors de son procès vendredi dernier, sur les quatorze autres qui devaient également comparaitre, Souleymane Kéïta n’était qu’avec deux de ses coaccusés à savoir Boubacar Sawadogo, 51 ans et Moussa Maïga, 33 ans, tous appartenant à la « branche d’Ansar Dine » au Burkina, leur pays d’origine. Selon l’accusation, Boubacar Sawadogo avait lui-même été enrôlé par Ansar Dine d’Iyad Ag Ghali, dans le nord du Mali, avant de rentrer chez lui au Burkina Faso où son nom a été cité dans les attentats de Ouagadougou en 2016. C’est de retour en territoire malien, en décembre 2018, qu’il sera finalement arrêté.
A la barre, Souleymane Kéïta, 61 ans, n’a exprimé aucun remord sur les actes qu’il a posés affirmant que son combat visait à dénoncer la » laïcité de l’Etat malien « . Il s’est même dit prêt à recommencer s’il en avait la possibilité. Réfutant la qualification de terroriste, il a indiqué : » Je mène le jihad à la frontière entre le Mali, le Burkina et la Côte d’Ivoire au nom d’Ansar Dine « . Finalement, c’est après un peu moins de quatre tours d’horloge que Souleymane Kéïta et les deux coaccusés présents ont été condamnés à mort. Une peine similaire également infligée aux douze autres co-accusés, condamnés par contumace en raison de leur absence. D’aucuns soulignent qu’ils pourraient faire partie des détenus libérés en échange d’otages.
Une dizaine de gendarmes tués
Il faut signaler que malgré le démantèlement de la Katiba Khalid Ibn Al-Walid/ Ançar Dine Sud avec l’arrestation de plusieurs de ses chefs, quelques membres de cette nébuleuse demeurent actifs. Même si beaucoup sont à l’origine de la création de la Katiba Sèrma dont les membres sont très actifs sur la bande frontalière Mali-Burkina, d’autres continuent à mener quelques incursions dans la région de Sikasso, particulièrement vers la frontière ivoirienne. Parfois, il leur arrive même d’aller au-delà comme ce fut le cas de l’attaque perpétrée, au mois de juin dernier, contre une caserne de la localité de Kafolo, au Nord de la Côte d’Ivoire où une dizaine de gendarmes ont été tués ainsi que de nombreux blessés.
Récemment, des informations faisaient état d’une alerte à une nouvelle incursion en cours de préparation dans la zone. Outre Sikasso, le fait que les membres de cette katiba soient toujours actifs peut expliquer les récentes flambées de violences observées vers d’autres parties du sud du pays telles Ségou, Koulikoro, Kayes et du côté burkinabé. Aussi, il faut préciser que les noms de certains éléments de la Katiba Ançar Dine Sud ont été retrouvés parmi les plus de 200 prisonniers libérés au mois d’octobre dernier en échange de Soumaïla Cissé et trois otages occidentaux.
A noter qu’il existe un moratoire au Mali concernant la peine de mort qui n’est pas appliquée depuis les années 80. Très généralement, elle est commuée en peine de prison à perpétuité.